25 novembre 2019
Armoiries et emblèmes de la ville de Québec
Les armoiries, tout comme le drapeau et les sceaux, ont une fonction symbolique et politique importante. Élaborés avec soin, ces visuels assurent une représentation officielle d’un pays, d’une province ou d’une municipalité. Leur utilisation est généralement réservée aux cérémonies protocolaires, aux proclamations officielles, à l’attribution de prix et de distinctions, ainsi qu’aux mentions de réussite personnelle et professionnelle. Les armoiries figurent également sur les insignes des divers services, tandis que le drapeau répond aux divers besoins de pavoisement. Dans cet article, revisitons l’histoire et la symbolique héraldique entourant les emblèmes de la ville de Québec.
Les premières armoiries de Québec
Les premières armoiries de la ville de Québec se blasonnent ainsi : « De gueules au léopard couronné et tenant dans sa dextre une clef d’or à la bordure rivetée d’or ». La bordure rivetée est parfois absente. La devise se lit « Natura Fortis Industria Crescit », ce qui signifie « Nature forte croît par le travail ». Selon des versions, l’écu est supporté par deux anges et est timbré par une couronne française.
Le moment exact où ces armoiries ont été créées est inconnu, mais les armes sont semblables à la partie inférieure de celles accordées au diocèse anglican de Québec par le roi britannique George III en 1793. Il est plausible de penser qu’elles datent aussi de la fin du XVIIIe siècle.
La ville de Québec a été incorporée en 1833 et a tenu ses premières élections en avril. L’une des premières décisions du conseil municipal est de doter la ville d’un sceau officiel. C’est le conseiller municipal Joseph Légaré, qui est aussi un peintre célèbre de la Vieille Capitale, qui conçoit le premier sceau de la ville de Québec. Meublée à profusion, l’illustration présente une figure allégorique féminine qui, telle une déesse, tient une corne d’abondance ainsi qu’un bouclier orné des armoiries de la ville. À ses côtés, un castor et une ruche évoquent la prospérité et les valeurs liées au travail. À l’arrière-plan figurent le cap Diamant, le fleuve Saint-Laurent, un navire et les collines annonçant la côte de Beaupré. La devise latine est également reprise. Ce sceau « concurrence » parfois les armoiries elles-mêmes!
Après son adoption officielle, le 23 mai 1834, le nouveau sceau de Québec fait son apparition pour authentifier les ordonnances, règlements ou résolutions officiels. Mais, en même temps, il devient l’emblème de la ville et, à ce titre, orne ou illustre de multiples documents administratifs.
Le graveur d’origine irlandaise John Henry Walker, très actif comme illustrateur de magazines politiques mais aussi comme dessinateur d’étiquettes, de monuments de Québec ainsi que d’emblèmes d’associations, de groupes maçonniques ou d’organismes publics, reprend ce visuel dans le dernier tiers du XIXe siècle. Ce dessin apparaît sur des documents de la ville de Québec datés de 1884 à 1919.
Utilisée comme emblème, voire comme armoiries pour les documents de la ville, cette illustration fut également reproduite sur de multiples objets. On le vit ainsi apparaître sur des pièces de la banque de Québec et des billets de la Banque Nationale, de même que sur des médailles. Le tricentenaire de Québec, en 1908, s’avère une occasion exceptionnelle pour mettre cette belle image en valeur, non seulement sur les médailles et sur des insignes officiels, mais aussi sur des objets souvenirs tels des broches, des assiettes et des cuillères. Sous une forme ou l’autre, ce visuel sera officiellement en usage jusqu’en 1949.
De nos jours, on en retrouve encore la trace à différents endroits, notamment à l’hôtel du Parlement, où elles surmontent la statue de Samuel de Champlain. Depuis 1961, la Société numismatique de Québec l’a utilisé et reproduit maintes fois, sur des médailles, des jetons, des billets ou d’autres documents.
Les emblèmes actuels
Au sortir de la Deuxième Guerre mondiale, la ville ressent le besoin de moderniser ses emblèmes. La nécessité d’avoir un nouveau blason surgit plus particulièrement lorsque les administrateurs municipaux décident de graver les armoiries de la cité sur l’un des murs de l’usine de pompage, rue Saint-André. La complexité du sceau créé en 1833 ne répond plus aux valeurs modernes! En octobre 1946, le maire Lucien Borne et son conseil municipal décident de constituer un comité des Armoiries.
Le comité, sous la présidence d’Édouard Flamel, ingénieur en chef de la cité, comprend Valère Desjardins, archiviste-statisticien, qui agit comme secrétaire. La collaboration de Maurice Brodeur, héraldiste, est demandée le 18 décembre 1947. Le comité s’adjoint, à titre de consultants, Gérard Morisset, membre de la Société Royale du Canada, et Marius Plamondon, professeur de sculpture à l’école des Beaux-Arts de Québec, hérauts de l’Autorité héraldique du Canada.
Après plus d’un an et demi de recherche, un nouveau visuel est enfin créé. L’artiste-peintre Gordon Macpherson dessine le motif, tandis que Judith Bainbridge en réalise la calligraphie. Le conseil municipal adopte les nouvelles armoiries en 1949. Le 20 septembre 1988, elles sont les premières armoiries à être enregistrées par l’Autorité héraldique du Canada.
C’est le 20 septembre 1988 que la ville de Québec se voit concéder officiellement les armoiries et le drapeau qu’elle arbore toujours aujourd’hui. L’annonce des lettres patentes est publiée le 26 novembre 1988 dans la Gazette du Canada, volume 122, page 4626.
Les nouvelles armoiries sont décrites ainsi : «D’azur à la champagne burelée-ondée d’argent et d’azur sommée d’un navire ancien voguant à pleines voiles d’or, au chef de gueules bordé d’or et chargé de deux clés d’or passées en sautoir, à la feuille d’érable de sinople brochante sur les clés. » Le cimier des armes de la Ville est « Une couronne murale maçonnée de sable et ajourée de gueules. »
La devise officielle de la ville est « DON DE DIEU FERAY VALOIR ». Cette devise combine à la fois en un jeu de mots le nom du vaisseau de Champlain ainsi que l’expression du courage et de la détermination de vivre des Québécois.
Quant au drapeau, il arbore les motifs suivants : « D’azur à un navire ancien voguant à pleines voiles d’or, à la bordure crénelée d’argent. »
Une riche symbolique
Les symboles officiels de la Ville de Québec affichent divers symboles héraldiques riches de signification :
- Le vaisseau évoque l’histoire maritime de Québec, depuis le découvreur, Jacques Cartier, et surtout celui qui a fondé la ville en 1608, Samuel de Champlain. Il rend aussi honneur à la vocation maritime de la ville qui, au milieu du XIXe siècle, fut l’un des plus importants centres de construction navale au monde. Les voiles gonflées symbolisent la fermeté et la vaillance de la population.
- Les clés rappellent l’histoire politique et municipale de la ville de Québec. La clé de droite symbolise Québec, capitale de la Nouvelle-France et du Canada au début du Régime anglais et du Bas-Canada, tandis que celle de gauche représente la capitale du Québec depuis la Confédération.
- La feuille d’érable évoque la personnalité canadienne de la ville et sa diversité culturelle.
- Le burelé-ondé représente le fleuve Saint-Laurent.
- Enfin, la couronne murale et la bordure crénelée indiquent que Québec est une ville fortifiée, tout en rappelant que son fondateur, Champlain, venait lui aussi d’une ville fortifiée : Brouage, en Saintonge.
Les couleurs utilisées dans ces symboles officiels revêtent aussi une grande importance héraldique :
- l’or signifie la force, la foi, la justice, la richesse, la constance et l’éclat;
- l’argent symbolise l’humilité, la pureté, la charité, la vérité et la victoire;
- l’azur (bleu) représente la souveraineté, la majesté, la sérénité, la bonne réputation, le savoir, la clarté et la loyauté;
- le gueules (rouge) exprime l’amour, la douleur, la grandeur, le courage, la générosité, la vaillance et l’intrépidité;
- le sinople (vert) évoque enfin l’espérance, le renouveau, l’abondance, la beauté, la liberté et la gaieté.
Munis de ces précieuses informations historiques, patrimoniales et héraldiques, vous saurez désormais apprécier d’un œil connaisseur les emblèmes officiels de la ville de Québec.