17 août 2019
Il y a 75 ans: première visite du général De Gaulle à Québec
Charles de Gaulle est une figure marquante de l’histoire politique et militaire du XXe siècle. Venu à trois reprises au Québec, c’est le 12 juillet 1944 que le général de Gaulle a foulé pour la première fois le sol de la Vieille Capitale. Un mois après le débarquement de Normandie et 45 jours avant la libération de Paris, l’homme vient remercier les Québécois d’avoir répondu à l’appel au secours lancé le 1er août 1940. Petit récapitulatif de cette courte visite, dont on souligne cette année le 75e anniversaire.
Un peu de contexte
On dit parfois que ce sont les grands événements qui créent les grands hommes. Dans le cas qui nous intéresse, c’est la Seconde Guerre mondiale qui permet à Charles de Gaulle de devenir l’une des figures de la Résistance et d’entrer dans l’Histoire.
Au moment où l’armée nazie envahit la France, Charles de Gaulle s’illustre à plusieurs reprises à la tête de ses chars, arrêtant notamment les Allemands à Abbeville à la fin du mois de mai 1940. Nommé général le 1er juin suivant, puis sous-secrétaire d’État à la Défense nationale et à la Guerre, de Gaulle doit se replier à Londres après l’annonce de l’armistice conclue par le maréchal Pétain. Avec l’accord de Churchill, il invite les Français à refuser la collaboration et à combattre l’ennemi nazi : cet appel à la résistance sur les ondes de la BBC, le 18 juin, lui vaut d’être condamné à mort (par contumace) par le gouvernement de Vichy.
De Gaulle, chef militaire en exil, organise la résistance en vue de libérer la France. Il fonde le Comité français de la Libération nationale (CFLN) et structure des forces armées qui deviendront les Forces françaises libres. En 1944, toujours exilé, le général devient le président du gouvernement provisoire de la République française (GPRF). Après le débarquement en Normandie, le 6 juin 1944, de Gaulle insiste auprès du général Eisenhower, commandant en chef des armées alliées, pour que la ville de Paris soit libérée promptement.
Rappelons que, dans ce contexte de guerre mondiale, les alliés ne reconnaissent toutefois pas le général comme le représentant légitime de la France! C’est d’ailleurs la raison pour laquelle de Gaulle n’a pas été convié à la Conférence de Québec, en 1943.
Un voyage en Amérique
C’est à l’été 1944 que Charles de Gaulle entreprend un voyage aux États-Unis afin de discuter avec le président américain Franklin Delano Roosevelt. Sa visite aux États-Unis, du 6 au 11 juillet 1944, vise à rassurer le président américain sur ses intentions. Le général français est reçu à la Maison Blanche.
C’est dans la foulée de ce voyage diplomatique que le président du gouvernement français provisoire remonte vers le nord afin d’effectuer une courte visite au Canada.
Visite au Québec
Le 11 juillet 1944, de Gaulle entreprend le voyage à Ottawa, qu’il visite pour la première fois. Dès sa descente de l’avion, il est très bien reçu par le premier ministre du Canada, William Lyon Mackenzie King, qui le traite en chef d’État. Devant le Parlement canadien et en présence du Gouverneur général du Canada, de la princesse Alice, du Premier Ministre et du corps diplomatique, le militaire de 53 ans prononce un discours dans lequel il rappelle les liens entre la France et le Canada, notamment en ces heures sombres où la botte nazie écrase les nations européennes. Il fait aussi comprendre à demi-mots qu’il est catholique (et non un républicain athée), dans le but de se concilier les élites cléricales de la province.
Salutation militaire de Charles de Gaulle à son arrivée à l’aéroport de L’Ancienne Lorette, près de Québec, le 12 juillet 1944. Bibliothèque et archives nationales du Québec, P600,S6,D5,P278. Domaine public.
Le général allonge son voyage d’une journée pour se rendre à Québec. C’est dans le brouillard qu’il quitte la capitale fédérale pour la capitale provinciale au matin du 12 juillet 1944. Le petit avion atterrit à l’aéroport de L’Ancienne-Lorette. Précédée par une douzaine de motos de la police, la voiture du général parcourt la Vieille Capitale jusqu’à l’hôtel de ville. Il reçoit un chaleureux accueil du maire Lucien Borne et d’un grand nombre de personnalités de la capitale, dont le docteur André Simard, du Comité de la France Libre de Québec. Fait à noter, c’est à Québec qu’a été créé le tout premier comité de la France Libre hors de l’Angleterre. Le Général se rend ensuite à la résidence officielle du Lieutenant-gouverneur.
L’après-midi même, le Général de rend à Montréal, où il visite le parc La Fontaine et dépose une couronne de fleurs au pied du cénotaphe érigé à la mémoire des soldats français ayant donné leur vie pendant la Première Guerre mondiale. Il rencontre ensuite le premier ministre québécois, Adélard Godbout, et le maire de la métropole, Adhémard Raynaud. Il y signe le livre d’or de la Ville. D’un balcon de l’hôtel Windsor, le général prononce un discours devant une foule de quelques centaines de partisans massés au carré Dominion. Beaucoup de Français sont également sur place pour entonner la « Marseillaise » avec le Général. Enfin, le soir même, le Général prend à nouveau l’avion et quitte le Québec, sans savoir qu’il n’y reviendra qu’en 1960.
Quelques semaines après le passage du général de Gaulle au Québec, la Ville Lumière est enfin libérée de l’occupant allemand. Le 25 août, les troupes menées par le général Leclerc parviennent à chasser les nazis : la Libération permet à la France de retrouver son unité et sa souveraineté. De Gaulle se réinstalle au ministère de la Guerre, à Paris, signifiant que Vichy était une parenthèse et que la République n’a jamais cessé d’exister. Le lendemain, 26 août, il descend triomphalement les Champs-Élysées.
Ce n’est que le 23 octobre 1944 que le gouvernement provisoire – et son chef, le général de Gaulle – sont enfin officiellement reconnus par les États-Unis, la Grande-Bretagne et l’Union soviétique.
Mémoire du général de Gaulle à Québec
Le général de Gaulle gardera toujours un souvenir ému de sa première visite en sol québécois en 1944. Il en parlera d’ailleurs dans ses Mémoires de guerre.
Quelques années plus tard, en avril 1960, c’est à titre de président de la République française que Charles de Gaulle revient au Québec. Dans la foulée de la Révolution tranquille, il œuvrera notamment pour resserrer les relations franco-québécoises. En juillet 1967, il effectue sa 3e et dernière visite chez nous, occasion lors de laquelle il prononce son désormais célèbre «Vive le Québec libre!».
Une statue du général orne le terre-plein au coin de Grande Allée Est et du Cours du Général-De Montcalm, tout près du Manège militaire Voltigeurs de Québec.